Italie du Nord : Plus de 50 ans de "Convivenza
Un territoire donné peut-il être habité par une seule foule / un seul groupe ? Sommes-nous coincés dans la mentalité suprématiste, qui implique qu'une foule domine inévitablement une autre ?
Voici un aperçu du 50ème anniversaire d'une transition réussie :
Un conflit de longue durée entre l'Autriche et l'Italie au sujet d'une province frontalière a trouvé un cadre de règlement en 1972, officiellement appelé "le deuxième statut d'autonomie". Certains des principaux acteurs de la négociation de ce règlement étaient des personnalités publiques qui connaissaient I&C / Caux et s'en inspiraient.
Des membres du Parlement italien de bords opposés se sont retrouvés du même côté dans le contexte du Parlement européen, et là...., ils ont appris à travailler ensemble : Ce n'est là qu'un des nombreux éléments qui ont contribué à éliminer les goulets d'étranglement de ce cadre négocié.
Flashback sur 1970 et le Dr. Karl Mitterdorfer, député européen
Une nouvelle saison de rencontres est en cours dans l'ancien Caux Palace Hotel. L'une d'entre elles était une "consultation entre Irlandais du Nord et Tyroliens du Sud". Qu'avaient-ils en commun ? Les problèmes posés par les frontières de l'État qui traversent les zones d'installation des populations, mais pas dans le tiers-monde, en Europe.
Karl Mitterdorfer, député italien représentant la province germanophone du Tyrol du Sud à Rome, accompagné d'un vice-président et d'un sénateur du même parti politique, s'était rendu en Irlande du Nord quelques mois auparavant pour rendre compte de l'accord conclu dans le cadre de leur conflit sur l'autonomie régionale. Commencé en 1919 avec l'attribution de cette province de l'Autriche à l'Italie, ce conflit s'est intensifié sous le fascisme italien et a dégénéré en violence armée dans les années 1960. L'autonomie régionale n'a pas été mise en œuvre, bien qu'elle ait été approuvée par une résolution des Nations unies du 5 septembre 1946.
Mitterdorfer et son collègue sénateur n'étaient pas d'accord sur la politique à suivre, et il s'est avéré qu'ils ne l'étaient pas non plus sur le plan personnel. Devant un auditoire de Belfast, Mitterdorfer expliqua : "Une situation causée par un nationalisme étroit ne peut être résolue par un autre nationalisme... Des deux côtés, on a compris que la négociation était le moyen de résoudre ce problème. Mais les meilleures lois ne peuvent que désamorcer une situation, elles ne suffisent pas à elles seules. En novembre dernier, notre parti a approuvé le "paquet" (ensemble négocié de mesures relatives à l'autonomie, ndlr). Il y a deux ans, j'ai visité Caux pour la première fois, conscient que nous avions besoin d'aide. Il m'est apparu qu'il ne s'agissait pas de renoncer à nos droits, mais plutôt de grandir dans une responsabilité qui dépasse nos propres intérêts, qui ouvre la voie à l'approche de positions opposées. Il fallait changer quelque chose...
Mitterdorfer décrit ensuite une réunion avec un dirigeant du parti gouvernemental de l'époque à Rome, qui s'est terminée par l'aveu inattendu des erreurs de ce dirigeant, qui l'a ensuite réitéré au Parlement. Se tournant vers son propre collègue sénateur, il a expliqué au public de Belfast qu'ils avaient eu de rudes affrontements verbaux sur les politiques à mener, avec le risque d'une scission au sein du parti. Un jour, j'ai eu l'idée de lui parler... En examinant ma position, j'ai découvert beaucoup d'envie et de jalousie à l'égard de collègues que je considérais comme plus talentueux et plus performants que moi. Après mûre réflexion, j'ai présenté mes excuses à mon collègue sénateur pour les choses qui me séparaient de lui... Je ne voudrais pas surestimer des démarches personnelles comme celle-ci. Mais je sais qu'elle a introduit une nouvelle dimension dans nos relations... Elle a peut-être contribué à maintenir l'unité de notre parti, ce qui est indispensable pour nos relations avec le gouvernement italien".
Vingt-deux ans plus tard, en 1992
Les clauses d'application du statut d'autonomie ont finalement été mises en place, les ambassadeurs de l'Autriche et de l'Italie auprès des Nations unies ont déposé leurs déclarations de règlement auprès du secrétaire général des Nations unies. Le correspondant à Rome du quotidien suisse Journal de Genève écrivait le 11 juin : "Une question brûlante d'autonomie régionale, qui a commencé à la fin de la Première Guerre mondiale, est (...) réglée. Trente-deux ans de négociations pour un conflit vieux de soixante-dix ans ! Il n'est donc pas exagéré de parler d'un "accord historique", comme l'a dit Silvius Magnago, président de longue date du parti du Tyrol du Sud (SVP)...
Le président Magnago avait conduit les délégations à Caux avec leurs homologues italiens. De nombreuses personnes ont tissé la tapisserie de cet "accord historique", dont Mitterdorfer, qui, après une jeunesse déchirée par la guerre, voulait en fait devenir violoniste.
L'histoire se poursuit 23 ans plus tard, le 6 mars 2015, le quotidien italien La Stampa, couvrant la visite de son Premier ministre à Moscou, titrait : "Renzi à Poutine : le modèle du Tyrol du Sud...
Puis, au début de l'année 2017, Mitterdorfer est décédé, un jour seulement avant son 97ème anniversaire. L'un des orateurs présents à ses funérailles a souligné ce qui suit : "Votre grande réputation en tant que député à Rome, mais aussi en tant qu'homme politique européen, reposait sur le fait qu'il était dans votre nature de savoir combiner la loyauté envers les valeurs de votre patrie tyrolienne avec le cosmopolitisme.
Enfin, en 2021, l'actuel président de l'UDC, Philipp Achammer, a rendu hommage à son prédécesseur Magnago : C'est avec beaucoup de gratitude, mais aussi d'humilité, que nous commémorons aujourd'hui (11ème anniversaire de la mort, ndlr) Silvius Magnago, dont l'héritage politique se retrouve presque chaque jour au Tyrol du Sud, que ce soit de manière inconsciente ou consciente".
2023-03-30 / Christoph Spreng
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